Aurélie Pétrel, de l’aube à
l’aube
Des
liaisons dangereuses
A l’aube de tout mystère ! J’ai vu la photo d’une photo d’Aurélie Pétrel, de son exposition « A l’Aube », préparée et bientôt en cours à Lisbonne, et j’ai lu « Les Pâques à New York » de Blaise Cendrars. Voilà ce qui m’est arrivé (évènement au 12, Domaine du Vaudon):
De
l’aube à l’aube il n’y a qu’un vol (de plume sans ailes)
De
l’aube d’un aéroport à Tokyo, ou l’artiste était présente cette année même
(Malek Abbou l’accompagnait-il ou pas ?). Un siècle plus tôt, en avril,
Blaise Cendrars était présent à New York et écrivait, dans « Les Pâques à
New York » :
« L’aube
tarde à venir, et dans le bouge étroit
Des
ombres crucifiées agonisent aux parois.
…
Seigneur,
l’aube a glissé froide comme un suaire
Et
a mis tout à nu les gratte-ciel dans les airs. »
D’une aube l’autre : le blanc – le pâle – la
transparence.
Mais aussi du blanc spectral de l’aube, moment de la
journée, au blanc mat du vêtement, aube enfilée par les officiels des cultes
religieux. Et l’aube enfilant l’aube : le matin se couvrant du blanc avant
la cérémonie du levant.
J’ai cru déceler dans le verre qu’Aurélie Pétrel
utilise pour redimensionner ses photos, une aube, à la fois figée et
vivifiante. Leur tombeau saint d’où la photo va sortir ressuscitée.
D’ici au suaire il n’y a qu’un pas. L’aube qui
devient suaire dans le vers de Blaise Cendrars me le confirme. La vitre
d’Aurélie Pétrel devient l’habit, après avoir été le linceul. Le baptême après la résurrection. Je le préfère
(aussi !), cet ordre.
Alors
son vernissage à Lisbonne, le 10 novembre, pourrait être un tel baptême : « Tu es une création nouvelle,
[…], ce vêtement blanc en est le signe. »[1] Ainsi,
l’aube n’est-il pas le vêtement du sacerdoce ministériel, mais du sacerdoce
baptismal.
Et l’art d’Aurélie Pétrel – est-il
un sacerdoce ? Renée ? Non – Aurélie… Du grec « aurios », «matinée », aurore. De l’aube
vers l’aurore, le levant (et le Pays du soleil levant !) à travers le
verre (l’aube de verre).
Comment a-t-elle travaillé jusqu’à maintenant ?
Elle nous le dit elle-même : «
[…] une manière singulière d’aborder l’image. L’une d’elle a par exemple été,
avec Reboot,
de l’aborder avec le volume, en détachant la partie blanche qui est normalement
directement collée à l’image. […]C’est le papier blanc, RC ou baryté, qui
va enregistrer les informations de l’agrandisseur. Ce qu’on appelle la photographie
c’est le support physique. Dans les modules que j’ai présentés au Palais de
Tokyo, j’ai simplement enlevé ce blanc, que j’ai traduit sous la forme de
volumes : l’angle d’une pièce par exemple. […] J’ai travaillé de manière à
ce que les images gravées sur verre puissent être lues à la fois comme des photographies
et comme des volumes. Le deuxième axe sur lequel j’ai travaillé, c’est le fait
que ces photographies soient transparentes : il y avait cette notion de
présent, qui normalement est exclue de la photographie. »
Va-t-elle
encore renaître, à travers d’autres « manières » ? Affaire à
suivre.